Pierre Coutras, mon grand-oncle par alliance, par Christiane

Christiane Aragonais, épouse de Claude Rey, fils de Henri Rey, fils de Marguerite Rey, sœur de Suzanne Rocheblave, épouse de Pierre.

Christiane Aragonais Rey
Christiane Aragonais Rey

Préface de son livre « Marseille mon village natal », première édition 2004.

« Il faut écrire ses mémoires avant de ne plus en avoir ».
Tristan Bernard.

Cette citation aurait plu à Pierre Coutras. Il est inutile de chercher sa biographie dans les librairies huppées de la Canebière et d’ailleurs…, non, vous la trouverez uniquement en bien fouillant dans les archives poussiéreuses de son Capharnaüm. Là, dorment ses articles de presse, ses revues littéraires, ses collections hétéroclites. Vous pourrez aussi la rencontrer distillée sur quelques pages de ses romans, ses agendas ou dans ses carnets de route. Il l’a composée lui-même, au fil du temps. Pour qui veut le connaître, le meilleur chemin est de plonger au cœur de ses écrits.

Une simple phrase, relevée dans la Revue des Indépendants, peut le représenter : Pierre Coutras était « Un humoriste, un sentimental, un original ». S.R., La Revue des Indépendants, 1926.

Il a vécu avec bonheur et gravité, la « grande aventure » du XXème siècle. Attiré par les nouvelles technologies, il encensait le gaz, l’électricité, les navires à vapeur, les trains, l’automobile et l’avion. D’une intelligence alerte et d’une habileté surprenante, il excellait autant dans les domaines manuels, qu’intellectuels.

Sur ses cartes de visite, il pouvait mettre :

Pierre Coutras, avocat au barreau de Marseille, homme de lettres, écrivain et poète, coureur automobile, artiste peintre, cinéaste amateur, photographe et collectionneur.

Il aurait pu ajouter : Marseillais « d’origine grecque », issu d’une famille de marins implantée à Toulon et d’avocats marseillais, inventeur de sa vie, écologiste, penseur, royaliste à ses moments et anarchiste à d’autres, anticollectiviste et antiparisianiste, promoderniste et anticonformiste, explorateur de mondes parallèles, ce qui lui a valu le titre de « Mage des temps modernes ».

Il se voulait maître du temps. Il affectionnait les montres et confectionnait des horloges, mais, dans sa vie quotidienne, il refusait de vivre dans la mêlée et se mettait hors temps.

Il était le grand-oncle de mon époux. En entrant dans la famille, vers les années soixante-huit, j’ai eu l’immense bonheur de le rencontrer dans sa maison, à Marseille, ou dans sa demeure du Castanier, en Lozère.

Il a pu en quelques années me communiquer la finalité de ses passions : « sa quête incessante du sens de l’homme ». Il critiquait à souhait les codes et les lois qui régissent nos sociétés, il en parlait savamment en tant qu’avocat.

Il a su développer ses théories à travers ses écrits, ses peintures, ses recherches bibliques. Je ne pense pas qu’un seul domaine ne lui ait échappé.

Il avait une âme de collectionneur, son capharnaüm regorgeait de livres et d’objets hétéroclites. Il y gardait les moindres traces laissées par ses ancêtres.

"Capharnaum" plaque de laiton fixée au sol à l'entrée du deuxième capharnaüm.
« Capharnaum » plaque de laiton fixée au sol à l’entrée du deuxième capharnaüm.

Il vivait avec passion sa vie. Il aimait les courses automobiles et avait possédé les plus belles voitures de son époque. Sa dernière voiture fut une 2cv, qu’il appelait la « Rolls française ».

Du temps de nos échanges, je garde le précieux souvenir, de la petite salle à manger du second étage qui résonnait du son de ses horloges, sur la desserte trônaient dans une corbeille, des bananes séchées et des nèfles d’hiver et dans sa vitrine s’étalaient toutes sortes de merveilles. C’est là qu’il me recevait avec sa femme. Il logeait dans une maison bourgeoise, mystérieuse et obscure. Dès l’entrée, une étrange atmosphère se faisait sentir. Tout le long des escaliers étroits, les murs étaient couverts de tableaux du Maître et de marines représentant les navires de ses ancêtres.

L’homme m’impressionnait par son allure, son port de tête majestueux, sa main blanche qui venait caresser sa barbe légendaire ou sa pipe. Il irradiait de bonheur et de gravité. Il suscitait le respect. Tel un Patriarche, il prodiguait sa tendre affection par une imposition des mains au-dessus de vos fronts et vous communiquait sa force, lors de trop grandes séparations. « J’ai gardé l’horreur des départs, de tous les départs, des séparations, si courtes qu’elles doivent être. Je les sens comme définitives, éternelles. » (Les Piquants du marron. P.C).

Il portait en lui un autre monde, il travaillait la nuit. Il naviguait entre Rêves et Réalités et il le disait :

« Chaque être humain est un monde, toujours intéressant à explorer, différent de tous les autres. Quand cet être sait se décrire, s’analyser, son œuvre est originale, unique ».

« Chimères dans mon ciel, son sujet, c’est Moi ! » P.C

Avant de vous entraîner dans son univers, je tiens à remercier amicalement sa famille et chaleureusement sa fille madame Jeanne Corazza qui m’a prêté ses archives et ses plaques photographiques tirées du fonds Coutras et m’a communiqué ses souvenirs. Elle ne ménage pas sa peine, pour garder vivante sa mémoire.                           

Christiane Aragonais-Rey, Marseille, le 12 janvier 2000.

A la fin de son livre, Christiane écrivait :

Je laisse cette page aux futurs lecteurs, car je ne doute pas qu’ils aient de nombreuses anecdotes à nous transmettre.

Voici les témoignages reçus en réponse :